Ahlala Lylou, tu n’es clairement pas juriste, et c’est une matière souvent spécieuse que même eux manient avec prudence. Tout le monde s’imagine connaitre ses droits par rapport à la diffusion ou la prise d’une photo, mais fondamentalement personne ne sait de quoi il parle: c’est général. Mais bon, comme c’est un peu mon métier pour un part, je t’explique:
D’abord, il faut différencier “droit d'”auteur” et “droit à l’image”.
Le droit d’auteur consiste à la défense du créateur (ici le photographe) , les droits à l’image concernent la personne représentée (ici l’enfant, représenté par ses ayant-droit, les parents). Çà n’a rien à voir.
Commençons par la notion “d’oeuvre originale”.
Une oeuvre originale (outre le fait qu’on dispose de l’image unique et originale – le négatif, le fichier Raw qui sort de la camera etc) est une image ou le créateur a fait un effort créatif qui la rend particulière et unique: si on prend le portrait (d’un enfant, d’un adulte), ce sera TOUJOURS considéré comme oeuvre originale (le choix du moment, de l’éclairage, du décor, de l’expression, du stylisme (vêtements, coiffure… ne seront jamais pareils, même à quelques minutes d’intervalle, et même prise par la même personne). Ce qui n’est pas le cas de la reproduction d’une boite de conserve par exemple (et encore, si créativité il y a dans les reflets, l’angle, la lumière, le décor… ça deviendra une oeuvre créative et donc originale. Et de fait recevable en tant qu”originale” par un tribunal).
Les photos que tu publies sont TOUJOURS protégées par le droit d’auteur, même si tu ne signales pas un copyright ( le fameux petit © ).
Sauf si tu cèdes tes droits dans un cadre précis:
– tu mets une license “creative commons” (libre d’utilisation et de droits)
– tu cèdes par contrat tes droits à un tiers ( un client, un éditeur, dans le cas d’un site comme facebook, ), par voie de cession écrite ou de facturation reprenant précisément les caractéristiques de l’oeuvre et les limites d’utilisation.
Mais dans ce dernier cas, effectivement Facebook pourrait utiliser ta photo pour son usage puisque tu as signé une clause contractuelle de cession. Mais ce n’est PAS le cas de MR X qui a copié ta photo et qui s’en sert pour son propre usage. Une cession de droit est toujours nominale, et toujours limitée dans le temps, ou pour un nombre de publication déterminée. Facebook pourrait donc monnayer ou employer ton image à son profit (et encore), pas quelqu’un d’autre. Mais si ils devaient le faire, malgré qu’ils disposent des droits théoriques, je te garantis qu’ils te contacteront avant, te demanderont l’autorisation d’exploitation, et la certification qu’il n’y a pas de droit attachés (droits à l’image, ou droit d’auteur afférent ( la photo d’une façade que tu aurais photographiée, par exemple, et sur laquelle un architecte aurait les droits d’auteur… jusqu’à 70 ans après son décès, comme pour tous les créateurs, toi incluse)
Ils ne sont pas fous, Facebook.
Maintenant, c’est le cas particulier de Facebook et quelques autres. Tu ferais un blog, ou un site, ou une base de donnée image, ce débat n’aurait même pas lieu: c’est ton choix d’employer Facebook et de leur abandonner tes droits. Ce n’est pas eux qui sont venus te piquer tes photos, c’est toi que a choisi de leur laisser cette possibilité.
Par contre, là ou Facebook n’aurait aucun moyen de te piquer tes droits, ce serait d’héberger tes photos sur ton espace, et de mettre un lien sur facebook, genre “cliquez ici pour voir la photo de mon petit dernier”: tu n’aurais pas mis d’image sur facebook, et leur soit-disant droit d’exploitation serait nul et non avenu.
Ceci pour le droit d’auteur.
voici quelques notions de droit à l’image: cela en intéressera certaines, quant on voit des posts ici même “je ne veux pas qu’on me photographie lors de mon mariage”.
Le principe de base est le suivant: on peut TOUT photographier. Ce qu’on ne peut pas faire, c’est tout PUBLIER: le droit à l’image ne s’exerce qu’à la publication.
Un exemple: vous vous promenez dans la rue, quelqu’un fait une photo de vous: il est parfaitement dans son droit – il n’est pas question de lui demander d’effacer l’image (en digital) ou de détruire le film (en argentique).
Par contre, il publierait cette photo sur n’importe quel support, internet, revue, affiche… etc; vous êtes en droit d’intenter un procès et de demander:
– la suppression de l’image quant c’est possible
– des dommages et intérêts pour utilisation abusive de votre image.
SAUF:
– Si vous n’êtes pas le sujet principal (c’est une vue globale de la rue, c’est un portrait de vous, mais dans un groupe, ce qui implique de fait que vous n’êtes pas le sujet).
– Si l’autorisation de publier est impossible, ou aurait dénaturé une photo digne d’intérêt ( vous êtes de l’autre côté d’une rivière, la photo a un sens, et le photographe ne peut pas aller vous trouver pour faire signer une autorisation)
– Si la photographie est considérée comme informative (actualité etc) ou une oeuvre d’art.
– On ne peut pas photographier dans un lieu privé (sauf autorisation du propriétaire et/ou du locataire)
– On ne peut pas photographier dans un lieu privé d’accès public SI c’est clairement indiqué (pictogramme, indication à l’entrée, etc).
Un lieu privé d’accès public: le métro, un musée…etc
– On ne peut pas publier ( mais on peut photographier) une photo si la personne est mineure et qu’on ne dispose pas de l’autorisation du/des tuteurs: (parents, par exemple)
– on ne peut pas publier sans son consentement l’image d’une personne en situation qui porterait préjudice à son intégrité (mendiant, accidenté, personne dans une position ridicule ou particulière qui porterait atteinte à son image).
Dans ce dernier cas (et dans tous les autres), il faut faire attention quant au contexte dans lequel l’image sera publiée: si on fait par exemple la photo d’une jeune fille mince et couverte d’acné. Pas de souci, vous avez l’autorisation de photographier et de publier. Mais vous vendez l’image, et sans que vous soyez responsable, l’image de cette jeune fille se retrouve dans une campagne contre le Sida, votre éditeur et vous, vous êtes morts juridiquement parlant: ce n’est donc pas QUE l’image qui est concernée par le droit à l’image, le cadre d’utilisation aussi.
Donc prenons le cas d’une mariée qui ne veut pas se faire photographier:
– Elle peut l’interdire dans la salle louée pour l’occasion
– Elle ne peut pas l’interdire – et elles est obligé de laisser faire dans la rue ou dans un parc (quant elle sort de la voiture, quant elle pose en décor pour faire son album de mariage).
Par contre, elle pourrait procéder si le photographe publie sans autorisation, et si la photographie n’entre pas dans le cadre des normes précédentes: elle est dans un groupe, elle est photographiée de loin (c’est le paysage qui prend le plus d’importance, etc). Et quant on parle de publier , je veux dire “hors du cercle familial”: un amateur fait une photo de la mariée et la met dans son album photo qui ne sera montré qu’à des proches, il a le droit)
Dans le cas d’un enfant, le principe est le même (un groupe d’enfants qui courent dans la rue, pas de souci. Un portrait du bambin seul sur l’image, par contre, ça peut donner lieu à poursuites SI C’EST PUBLIE.
Ceci dit, les juges sont plus sévères concernant les enfants, les photos à but commercial, les photographies violant l’intimité (lieu privé).
Par contre, dire “c’est horrible de publier les photos d’enfants”, il faut arrêter cette psychose: N,n votre enfant ne vaut pas plus et n’est pas plus remarquable que les milliards d’autres. Il n’a rien d’exceptionnel. Une photo de lui n’est pas un crime de lèse majesté. Ni plus dangereux que de promener avec lui sur la rue. Auquel cas, il faudrait lui recouvrir la tête d’un sac poubelle avec 2 trous pour les yeux “des fois qu’un pédophile”… car ils sont autant dans la rue que sur internet, hein!
Maintenant, chaque cas est un cas d’espèce, et tout dépend de l’opinion d’un juge lors d’un procès (on peut toujours faire appel). Les règles succinctes que je vous soumets concernent l’Europe et plus particulièrement la France et la Belgique: les anglo-saxons, par exemple, s’appuient sur d’autres types de législations).
Comme je disais, les juristes sont très prudents concernant le droit d’auteur, et encore bien plus concernant le droit à l’image. Il y a souvent aussi des soucis car ni la police, ni les magistrats très souvent, ne connaissent bien ces lois particulières.
D’autre part, il faut raison garder: si une image que vous trouvez inacceptable apparaît sur un site chilien ou russe par exemple, bien sur vous pouvez intenter un procès. Mais vu les difficultés et les frais, je vous souhaite bon courage!
D’un autre côté, il y a quelques années, un procès en droit d’auteur m’a tout de même rapporté plus de 15000€. Il faut y réfléchir!
Tamara
Qui reste à disposition pour tout renseignement complémentaire. 🙂