Édito – Le corps de Marwa Bougachiche a été retrouvé. Le cœur de l’Algérie, lui, s’est brisé un peu plus. Un mois après sa disparition, le destin de cette enfant de 10 ans a été scellé dans la forêt de Jebel El Wahch, à Constantine. Une fillette, une promesse de vie, une innocence fauchée. L’ADN a parlé, le deuil est désormais officiel. Et la sidération, totale.
Il ne s’agit pas d’un fait divers. Il s’agit d’un échec collectif. Un échec de protection, de vigilance, de prévention. Marwa n’est ni la première, ni la dernière, et c’est cela le plus glaçant. Car dans chaque cri d’alerte ignoré, dans chaque signalement minimisé, dans chaque disparition vite classée, se creuse une brèche où s’engouffrent les prédateurs.
Marwa aurait dû être en train de rêver d’un été, pas d’être pleurée par une nation. Le silence qui entoure les violences faites aux enfants en Algérie est une forme de complicité. Il est temps de nommer les choses : agressions, viols, enlèvements. Il est temps d’arrêter d’avoir honte pour les victimes. La honte, c’est celle de l’impunité, pas celle des enfants agressés.
Comment se fait-il qu’un enfant puisse disparaître à la sortie de l’école, dans une ville densément peuplée, sans qu’aucune caméra, aucun témoin, aucune patrouille ne permette d’agir dans l’heure ? Comment se fait-il que des forêts deviennent des tombes pour les plus fragiles ? L’espace public, chez nous, est encore conçu par et pour les adultes. Les enfants y errent, invisibles, sans sanctuaire, sans filet de sécurité.
Il faut des lois. Mais surtout, il faut de l’empathie. Il faut que chaque disparition d’enfant déclenche une alerte nationale, à la manière de l’Alerte Enlèvement. Il faut des programmes scolaires d’éducation à la prévention des violences, adaptés à l’âge. Il faut des cellules psychologiques, un accompagnement digne pour les familles. Il faut des brigades spécialisées dans les crimes contre mineurs. Il faut cesser de tolérer l’intolérable.
Il faut surtout que chaque adulte comprenne qu’il est responsable. Nous sommes tous les remparts d’une génération qui grandit dans un monde incertain. Fermer les yeux, détourner le regard, banaliser l’horreur, c’est déjà trahir nos enfants.
Elle s’appelait Marwa Bougachiche. Elle avait un prénom doux, un sourire d’enfant, une vie devant elle. Que son nom ne soit pas juste une ligne dans une dépêche. Qu’il devienne un cri. Un cri pour toutes les Marwa que personne n’a cherchées. Pour celles qu’on a oubliées. Pour celles qu’il est encore temps de sauver.
Que la justice fasse son travail. Mais que la société, elle aussi, se réveille.
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