Elle est née en 1950 sur les hauts plateaux de Tiaret, dans le petit village de Tousnina, au cœur du sud-ouest algérien. Là où le désert frôle les cimes et où les vents emportent les légendes. De cette terre rude et poétique, Nora Aceval a hérité une voix — une voix habitée par les récits, les silences des aïeules, et la mémoire orale des femmes.
Issue d’un couple mixte — une mère algérienne, un père espagnol — Nora quitte l’Algérie à l’âge adulte. Elle devient d’abord infirmière diplômée, mais la littérature et surtout le conte oral la rattrapent. Portée par les souvenirs de son enfance, elle reprend des études de lettres modernes à l’Université de Paris, avec une ambition claire : sauvegarder l’imaginaire populaire algérien.
Dans les veillées d’autrefois, les enfants de sa tribu, les Ouled Sidi Khaled, se rassemblaient autour des femmes âgées — mères, tantes, grand-mères — pour écouter des récits entre réel et surnaturel. Ces femmes, gardiennes d’un savoir ancien, incarnaient une tradition orale où la frontière entre la vie et le mythe s’effaçait.
Mais Nora observe vite un danger : à chaque génération, l’oralité se perd, les récits s’effacent. Elle comprend que sans transcription, le patrimoine narratif algérien est voué à disparaître. Elle se fait alors scribe, traductrice, passeuse. Une mission qu’elle mènera avec passion tout au long de sa vie.
Son travail de collecte donne lieu à la publication de nombreux recueils. Nora Aceval écrit, conte, traduit… pour que jamais ne s’éteigne la voix des femmes du désert. Voici quelques titres emblématiques :
Dans ces récits, Jazia n’est pas une simple héroïne. Elle est l’incarnation de l’âme hilalienne, amoureuse du preux chevalier Dhiab, et chantée par les femmes depuis des siècles. Nora Aceval reprend ce flambeau avec une fidélité touchante, mêlant le souffle épique à la tendresse féminine.
Conteuse à voix nue, sans décor ni artifice, Nora Aceval se distingue par un art minimaliste et puissant. Elle alterne avec fluidité le français et l’arabe dialectal algérien, donnant à son public la sensation d’entendre les récits dans leur langue d’origine. Sa voix épouse le rythme des dunes, la musicalité des mots, la densité du silence.
Cette double narration, profondément enracinée dans les traditions de sa tribu maternelle, confère à ses prestations une authenticité rare. Elle ne joue pas le rôle de la conteuse : elle est la mémoire vivante de Tousnina.
À travers son œuvre, Nora Aceval affirme une volonté claire : redonner à l’Algérie ses histoires, ses héroïnes, son imaginaire collectif. Loin des stéréotypes, elle célèbre une Algérie plurielle, profonde, douce et rude à la fois, où les femmes ont toujours été les premières passeuses de savoir.
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